LE MOUVEMENT EN TROIS TEMPS
Si vous avez lu mes précédents articles, vous commencez à me connaître, vous savez que j’aime bien intellectualiser mon métier. C’est plus fort que moi, ça me vient comme ça, sous la douche pourrait-on dire. J’ai besoin de mettre des mots sur mon expérience pour la comprendre et en tirer le meilleur parti. Et parmi toutes les petites théories qui me traversent l’esprit, il y en a une que j’affectionne tout particulièrement parce qu’elle me permet d’avancer de façon efficace d’un point de vue professionnel au quotidien. Je la nomme : le mouvement !
Le premier coup de pédale
Le mouvement, c’est simple comme le vélo : vous donnez le premier coup de pédale et vous trouvez l’équilibre en prenant de la vitesse. Bon OK, pour le vélo c’est facile, vous ne vous posez même plus la question, mais pour le boulot, comment j’applique ce concept brumeux d’un point de vue pratique ? C’est facile, dès que je me trouve dans une impasse, je me mets « en mouvement ». Prenons quelques exemples concrets afin d’illustrer au mieux mon propos encore un peu abstrait, je vous l’accorde.
Allez, roule ma poule !
En illustration comme dans n’importe quelle activité, le plus dur c’est de commencer. J’ai rapidement compris que le secret de la page non-blanche c’est de poser le premier coup de crayon, ou de stylet comme on veut. Le reste vient tout seul finalement. Je note des tas d’idées d’illustration dans mes carnets, mais ces idées ne valent rien tant que le premier trait de crayon n’a pas été esquissé. Dernièrement j’ai développé un projet personnel sur le thème du vélo - j’adore le vélo, vous ne le saviez pas ? - J’ai ruminé l’idée des semaines, à réfléchir à comment je pouvais aborder le sujet, j’ai même commencé à chercher des livres sur le vélo pour trouver de l’inspiration, mais rien ne me semblait suffisamment intéressant pour commencer à développer le projet. Bref, j’étais dans une impasse. Un matin, j’ai décidé d’arrêter de cogiter et de me mettre au boulot - en mouvement comme dirait l’autre - j’ai pris une feuille, j’ai commencé par esquisser un vélo sans vraiment savoir où j’allais et tout s’est mis en branle. En moins d’une heure, j’ai trouvé non seulement la façon d’aborder graphiquement le sujet, mais j’ai aussi trouvé une finalité à ce projet. Le reste n’a été que développement. A ce jour, le projet vaut ce qu’il vaut, en tout cas il existe et qui sait ce qu’il en découlera. Commencer est le secret de l’action, si j’en crois mon expérience et le philosophe Alain.
Circulez, il n’y a rien à voir !
Mais c’est dans mes crises de doute les plus aigües que je trouve ma petite théorie très efficace. Inhérent aux métiers créatifs, le doute aime bien s’installer confortablement au fond de votre tête, dans la zone « artiste raté ». Il vous torture l’esprit, vous pousse vers des sommets d’angoisse pour mieux vous faire basculer dans des abîmes de désespoir, du genre : « ça y est, cette fois c’est la fin de ma carrière d’illustrateur, je suis nul… etc. » Vous voyez le tableau ? Dans ce moment-là, surtout ne pas rester comme une moule devant un Mac ou devant une page blanche. Ce n’est pas la peine d’insister, toute tentative de création s’avère être inutile. Il faut alors tout lâcher et partir faire un tour de vélo, marcher et voir autre chose. Il m’est arrivé parfois de perdre finalement une journée entière à ne pas vouloir la perdre, à butter sur une idée, bloqué sur une illustration, englué dans mes doutes. Ici encore le premier pas vers mon vélo, tout comme le premier coup de crayon, semble être la solution. Car Ô miracle, une fois en mouvement, tout finit par se débloquer au bout d'un moment.
Le petit vélo dans la tête
Il paraît que Steve Jobs prenait ses décisions importantes en marchant. Pour ma part, mes meilleures idées, je les ai eues en me déplaçant à pied, en vélo, en métro. Tout simplement parce que quand vous vous croyez que vous pensez à autre chose, et bien non, vous y pensez mais inconsciemment. Il n’est pas bien fichu le cerveau qui bosse pendant que vous vous baladez ? Être en mouvement n’empêche pas le cerveau de fonctionner, au contraire, il permet aux neurones de se connecter sans obstacles, libérés de toutes contraintes. Vous êtes en train de pédaler nonchalamment sur la piste cyclable de votre vie artistique, et là hop, surgit du fond de votre cervelle la solution à votre problème, et même parfois une idée géniale pour votre prochain projet personnel. Et puis, il est évident que plus vous allez à la rencontre du monde, plus vous nourrissez votre créativité.
Essayez d’appliquer le concept du mouvement, au moment où tout vous semble bloqué, lorsque « tout-est-fichu-et-qu’il-ne-vous-reste-plus-qu’à-abandonner-toute-forme-de-projet-artistique-et-partir-mener-une-vie-détachée-de-tout-dans-une-cabane-au-fond-des-bois ! » Vous m’en direz des nouvelles. Ah oui, une dernière chose, être en mouvement c’est bien, mais il faut aussi savoir s’arrêter de temps en temps, histoire de reprendre un peu de souffle.
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